Voilà que mon voisin a perdu son chat qui s’est volatilisé subitement, l’envie de découvrir la rue au-delà de la petite impasse où j’habite l’y poussant certainement. Mais comment un petit chat si mignon, fraichement sorti du lait maternel peut-il vivre dans la jungle des voitures, des passants bien plus grands que lui, des mâles en mal de femelles et qui ne lésinent pas quand il s’agit d’arborer leur suprématie, … Bref me voilà sans-dessus-dessous face à la nouvelle de la disparition de ce minou si joli. 

10h00 du matin, mon voisin sonne à la porte. Hier soir, Pattes Blanches (appelons-le, ainsi) n'est pas revenu de sa ballade habituelle. Il sait que son gentil minou se réfugie chez moi quand il travaille pour avoir des câlins et la sécurité. Moi, je suis une retraitée dont la présence journalière est bien vue par les chats du coin qui ne manquent pas de squatter ma maison quand il s'agit de se mettre au chaud. Mais voilà, je panique quand je ne vois pas un minou depuis un certain temps, même si je ne suis pas son gardien. De quoi est-ce que je me mêle ? Mes émotions s'entrechoquent et me montrent des scénarii tout aussi alarmants et j'en veux alors à ce voisin pourtant sympathique qui a laissé un chaton presque adulte marivauder, alors que je lui disais de faire attention. Pour qui est-ce que je me prends ? Et surtout, pourquoi ne puis-je éviter ces débordements de panique ?

Là est la question de l'analyse. Ne vous inquiétez pas, le chaton a été retrouvé trois jours après son escapade grâce à une personne qui l'a hébergé entre-temps. Enfin quelqu'un de chouette ! 

Alors, si nous regardions de plus près tous ces sentiments incontrôlés qui ont débordé dans mon mental, m’obligeant à voir la triste réalité : je ne maîtrise rien ! J’ai beau dire, beau faire, je suis remplie d’émotions. Rien de bien méchant, la grande majorité d’entre nous éprouve aussi beaucoup d’émotions mal maîtrisées qui les influencent quotidiennement.  Il faut méditer, certains pensent que la gestion émotionnelle passe par là. Cela demande un contrôle permanent, alors que le but est de devenir anémotif sans aucun contrôle. Qu’est-ce que signifie être anémotif ? La vibration du mot résonne avec froideur dans mon mental. Il se fige, car le rayonnement des émotions s’est subitement stoppé. Et pourtant, ce mot fait partie du vocabulaire des êtres qui se conscientisent, mais il est si en contradiction avec notre égo qui veut ressentir les émois avec leur chaleur, la souffrance, tout ce qui lui donne ce sentiment de vie. Moi aussi, je m’accroche à ces sensations même douloureuses, car quand elles ne sont pas là, vivre ne se justifie plus. Pourquoi devrais-je alors rester dans un monde qui ne présente plus d’intérêts puisque je ne le ressens plus ? La perception passe par les sens et les émotions sont dans le cercle de perception de notre conscience.

Je sais maintenant que les émotions permettent à chacun de se relier à la conscience collective et donc d’appréhender les formes de l’univers, le monde dans lequel notre corps physique s’exprime. Si je deviens anémotif, le lien avec cet espace collectif se coupe et ma conscience individuelle peut enfin s’affirmer en moi. Elle ne sera plus submergée par les pensées communes provenant de tous les êtres reliés entre eux, qu’ils soient humains ou non humains. Sur cette position enfin, je peux m’extraire de cette dimension, je n’ai plus de raison d’y demeurer et pour cela je dois me dégager de cette physicalité qui me retient. L’envie de vivre disparaît avec la fracture causée par la perte des émotions humaines, animales en nous. Nous partons vers d’autres contrées. Notre personnalité est toujours présente, mais au lieu d’être attachée à une conscience collective, elle s’est unie à la conscience individuelle de l’homme. Alors, l’univers s’ouvre à elle. L’égo a trouvé sa véritable place.

Comment devenir petit à petit anémotif sans perdre de son humanité, car nous ne sommes pas encore assez évolués pour quitter cette sphère terrestre. Là est la véritable question ?